Ahmet roule comme un as de la cascade : 1 heure à me demander si on ne va pas finir par se prendre l’un des camions qui viennent en face… mais non, il assure !Abulbari monte avec moi et prend la mitraillette qui était devant. Sur la route dont la premiere partie est sécurisée par des peshmergas (plusieurs contrôles sourires), il fait arrêter la voiture pour que je puisse photographier un ancien palais fortifié de Saddam. La réaction des 2 autres véhicules est instantanée et aurait constitué une protection efficace en cas de danger.
Arrivés dans la ville, je prends un dérisoire petit chat mort, mais la zone est dangereuse et je dois planquer les appareils.
Je suis bientôt entourée de mitraillettes compatissantes surmontées de peshmergas légèrement inquiets, avant de me retrouver un coca dans une main, une clope dans l’autre, et brusquement en pleine forme avec un UPK accroché à un bras via un tensiometre et qui répète « c’est bas, c’est bas » d’un air pénétré… aucune idée de mon niveau de tension et lui non plus je crois : savait juste qu’un tensiomètre ça s’utilise dans ce genre de situation !
Dans les locaux de l’UPK, un journaliste assure des émissions de radio auxquelles collaborent également des enfants, et s’occupe de la publication d’un journal.
Nous passons pas mal de temps dans le bureau d’Abdulbari qui navigue entre administratif et réglage de questions cruciales comme s’assurer la collaboration de tribus. Je lui demande si il a un message. Si ça nous paraît simple et évident, ça n’a pas l’air d’aller de soi pour tout le monde : « Dites qu’il existe un pays, le Kurdistan, qui veut vivre en démocratie »…
Les peshmergas ne se font pas prier pour prendre la pose. J’en profite pour exiger des sourires à la place de l’air sérieux conventionnel : ils ne se le font pas dire 2 fois !
Nous sommes invités a prendre le thé a la caserne d’a côté, mais faut attendre un peu pour les photos : le commandant est parti se faire tout beau !
Ils sont tellement mignons et enthousiastes que c’est difficile d’imaginer qu’ils risquent leur vie tous les jours, quand ce n’est pas plusieurs fois par jour…
Apres un repas dans ce qui doit tenir lieu de mess des officiers, nous laissons Abdulbari qui n’a pas l’air de chômer pour partir avec Ahmet (notre chauffeur garde du corps) et un attaché en communication moustachu avec qui je ne me sens pas en phase des le début : c’est rare avec les Kurdes, mais ça arrive de temps en temps.
Super journée ! … jusqu’ici.
En repartant pour Duhok, appel de Sophie qui nous attend. En apprenant que nous sommes allés a Mossoul, elle s’exclame ne doutant visiblement de rien : « Super ! Vous m’avez fait un reportage alors ? ». Sûr que je vais bosser gratuitement pour qu’elle n’ait plus qu’à signer !!!
Tom m’apprend qu’elle a profité de parler arabe pour faire croire aux Kurdes que j’étais photographe du Monde et donc que je dépendais d’elle. La moutarde commence sérieusement a me monter au nez, d’autant qu’elle m’a demandé deux fois si elle pouvait demander à l’UPK et au PDK de lui faire rencontrer le PKK, que je lui ai répondu deux fois par la négative, explications à l’appui, et qu’elle a quand même été poser la question dans mon dos a l’UPK.
Elle s’est bien évidemment faite éconduire poliment (et passer pour une conne par la même occasion), mais prétendre par dessus le marché décider à ma place de mon programme, là, ma patience atteind ses limites !
Nous perdons donc un temps précieux (nous n’avons que 5 jours) pour aller dormir à Suleymaniye et irons demain à Salahaddin, si elle ne vient pas encore foutre son bordel… d’autant qu’une intuition commence à me faire envisager que ça risque d’arranger nos accompagnateurs de faire semblant de croire à ses bobards, même si le moustachu est déjà venu me confier qu’elle le fatiguait !


